« Le froid comme outil de bien-être et de lâcher prise »
Osthéopathe et professeur de yoga, Mathieu Schlachet s’est plongé avec passion dans la méthode Wim Hof, une technique d’exposition au froid et de respiration, qui permet de résister aux températures les plus basses. Il était de passage à Nouméa, en février, pour faire découvrir cet art de l’acceptation, venu du froid.
Par Coralie Cochin
Comment avez-vous découvert cette méthode ?
Il y a une douzaine d’années, j’ai commencé à donner des cours d’osthéopathie dans les pays baltes. Le premier soir, les gens nous invitaient à un bania, une sorte de sauna russe qui consiste à alterner le chaud et le froid pour activer son système cardio-vasculaire. C’est aussi un moment très convivial. Je me suis senti bien comme rarement je ne l’avais été dans ma vie. Mais je n’avais pas d’explication à ce bien-être car à la base, j’étais quelqu’un de frileux.
C’est arrivé à un moment de ma vie où je travaillais sur un sentiment de tristesse que j’avais à l’intérieur de moi. Je suis tombé sur une vidéo du Néerlandais Wim Hof, expliquant que sa femme, bi-polaire, s’était suicidée et que certaines techniques autour du froid pouvaient aider à dépasser qui on était. J’ai décidé de le rencontrer et ça a été fort. J’ai suivi une première retraite de plusieurs jours en Pologne. J’ai loupé pas mal de choses car j’ai tout fait à la force de la volonté, alors qu’on peut aller plus loin et plus en profondeur en contactant la puissance du lâcher prise. Mais cette première expérience a fait fondre la glace pour libérer la lave du volcan.
Qu’est-ce que cela a changé dans votre quotidien ?
Je me suis senti plus fort. Mon attitude avait changé. Je me suis mis à m’entrainer tous les jours, à marcher, méditer, courir dans le froid. J’ai fait du paddle tout l’hiver sur la Seine avec l’un de mes partenaires, expérimentateur, lui aussi, en neurosciences. On prenait des notes sur notre ressenti et sur la différence qu’il y a entre subir ou, au contraire, accueillir ce froid.
Sur quoi repose concrètement la méthode ?
Il y a trois éléments principaux dans la méthode Wim Hof : l’exposition au froid, la respiration par le ventre et le focus mental (lire « On respire avec… WIM HOF »). En pratiquant les trois, les gens trouvent un moyen d’aller mieux dans leur vie. L’exposition au froid te permet de devenir conscient de la biologie de la survie. Sur la respiration, la méthode a montré qu’on pouvait augmenter les seuils de déclenchement de la douleur et aujourd’hui, je m’en sers pour guider des groupes. Elle permet aussi de libérer des hormones (dopamine, sérotonine, adrénaline…, ndlr). Avec Wim-Hof, on n’apprend pas seulement à résister au froid, on améliore notre santé physique et émotionnelle. Le froid n’est que la première marche à gravir mais cela revient à augmenter en soi la puissance d’acceptation, du lâcher prise… Cela change notre capacité à résoudre des problèmes, à nous connecter aux gens. Cela produit aussi des effets au niveau du sommeil et de la mémorisation.
Et matière de santé, quels sont les bienfaits ?
En tant qu’osthéopathe, j’ai accompagné pendant presque vingt ans des patients dans la prise en charge de la douleur, qui est mon champ d’expertise numéro un. Et jai glissé vers le « biohacking ». Ce principe considère l’humain comme une technologie que l’on peut « up-grader », optimiser, comme un ordinateur par exemple. On s’intéresse aux moyens de changer, de soi-même, sa physiologie pour aller mieux ou pour réaliser un objectif particulier. La respiration, la pensée, l’alimentation, le toucher, le sommeil, le sexe, sont autant de portes d’entrée. Or, le froid m’oblige précisément à changer ma manière de penser et de respirer, mais aussi mon comportement dans l’instant présent.
Ce qui m’intéresse, c’est les réponses que le froid peut apporter aux problématiques de santé. Même s’il faut rester prudent, il y a d’énormes espoirs portés sur le diabète, un sujet de santé public corrolé à l’obésité, mais aussi sur les pathologies psychiatriques, qui sont devenues le champ principal de Wim Hof, sa femme s’étant suicidée. Des travaux sont en cours aux USA et des recherches ont aussi commencé sur la maladie de lyme. En Angleterre, de plus en plus de piscines se développent en milieu naturel pour permettre aux gens de nager en eau froide. C’est incroyable de se dire que l’on peut se connecter à un élément naturel pour déclencher cette pharmacie interne qui est en nous.