Délice pour certains, horreur pour les autres, entre le marketing de la filière et la réalité du terrain, entre tradition et évolution des mœurs, entre souffrance animale et plaisir gustatif, le foie gras est loin de faire l’unanimité. Qui s’est réellement penché sur le sujet ? Rendez-vous dans les coulisses de la production de foie gras.
Par Quentin Folliasson pour VégéNC
Spécificité du foie gras, le gavage
Par définition réglementaire : « On entend par foie gras, le foie d’un canard ou d’une oie spécialement engraissé par gavage. » (art. L. 654-27-1 du code rural). Notons que cela est contraire à la réglementation de l’agriculture biologique qui stipule très clairement que le «gavage est interdit». Il n’existe donc pas de foie gras bio, ni de foie gras sans gavage, à moins d’une fraude.
Les canards subissent le gavage 2 fois par jour. On leur enfonce un tube de 20 à 30 cm dans le gosier pour y injecter une mixture à base de maïs qui équivaudrait pour un humain à 7 kg de nourriture ingurgitée en 2 à 3 secondes (méthode industrielle, la plus répandue) ou en 1 minute (méthode artisanale à la main).
Que le gavage s’effectue de manière moderne ou artisanal, il n’en reste pas moins forcé et une énorme souffrance pour l’animal et ne respecte pas ses besoins physiologiques et éthologiques, preuve en est des conséquences sur son état de santé.
Quels effets pour l’animal ?
Dans la nature, les animaux migrateurs (canards, oies) mangent dans le but de constituer des réserves pour leur voyage. Mais jamais au point de se rendre malade, et pas dans les quantités pratiquées pour la production de foie gras qui sont complètement contre nature. D’autant plus que le canard mulard, le plus communément utilisé, n’est même pas migrateur et incapable de voler.
Après le choc du gavage, les oiseaux sont pris de diarrhées et accusent un stress thermique, ils peinent à réguler la température de leur corps. Leur foie atteindra 10 fois son volume normal, ce qui aura pour effet de comprimer leurs poumons, rendant leur respiration laborieuse, leurs déplacements difficiles (dans les rares cas où l’animal n’est pas de toute façon enfermé dans une cage à peine plus grande que lui). Même leur centre de gravité est déplacé par cette hypertrophie des organes. On parle de stéatose hépatique, les animaux sont délibérément rendus malades. Les femelles auront été tuées à la naissance par broyage ou gazage, les mâles subiront ce triste sort et s’ils survivent au gavage, ils finiront à l’abattoir. Le taux de mortalité en phase de gavage est jusqu’à 20 fois supérieur qu’en phase d’élevage. Les animaux meurent littéralement du traitement qu’on leur inflige. Pouvons-nous ne serait-ce qu’imaginer l’enfer qu’ils subissent et nous mettre à leur place ? Le gavage peut également occasionner des lésions dans l’œsophage, surtout avec les cadences imposées par le productivisme.
Une filière sur le déclin : tradition d’un autre âge
La consommation de foie gras est en baisse, de plus en plus de gens savent et les prix sont de plus en plus élevés malgré une intensification et une industrialisation de la production. Aujourd’hui, l’immense majorité de la production est de type intensif. L’image du foie gras, malgré les efforts marketing considérables de la filière pour faire oublier l’horreur qu’implique sa production, est de plus en plus en ternie. 58% des Français sont favorables à l’interdiction du gavage (donc du foie gras) et plus d’un tiers (37%) refusent d’en acheter à cause des souffrances que cela implique.
La production de foie gras est d’ailleurs interdite dans la plupart des pays de l’union européenne et de nombreux pays dans le monde.
Sources :
https://stop-foie-gras.com/
https://visuels.l214.com/sites/www.l214.com/2017/pages/foie-gras/sondage-YouGov-L214-21112017.pdf
https://www.animal-cross.org/animaux-delevage/le-gavage-et-le-foie-gras/
https://www.gaia.be/en/node/729